Par contre, pour le plus grand nombre d'entre nous l'Europe reste encore une nébuleuse constellée d'idées reçues, de mythes et plus préoccupant de peurs. Elle nous apparaît fragmentée, comme autant de pièces d'un puzzle trop difficile à reconstituer. Un zeste de politique agricole ou de domaine maritime par ci, un peu de défense européenne par là, elle nous est servie au goutte-à-goutte.

L'Europe se noie dans mon yaourt
Est-ce qu'il existe des émissions grand public qui nous parlent vraiment de l'Europe ? Qu'est-ce que l'on me dit de l'Europe dans ma proximité ? Vous arrivez à faire tous les liens, à comprendre vraiment comment tous les dossiers s'imbriquent les uns dans les autres ? Moi non, il me manque toujours un chapitre, une page, une projection et pourtant je lis, j'écoute. Elle reste éparpillée dans mon quotidien. J'ai la certitude qu'elle peut se cacher dans l'étiquette de mon yaourt, dans la composition de mon chocolat, dans la quantité de poissons que les pêcheurs de ma région pourront prélever cette année. Mais je ne sais pas toujours pourquoi, ni qui a vraiment pris ces décisions. J'ai de l'Europe une vision fragmentée. Je rêve de voter, dossier par dossier, pour un député qui va se battre pour mes idées, dans une commission bien déterminée. Une question précise, un représentant avec des réponses claires, là au moins, on serait au coeur du sujet et j'aurai enfin l'impression de vraiment participer. Parce que franchement, mon député de dimanche, je suis incapable de vous dire très exactement ce qu'il fera en mon nom...

Europe, la TV en " service minimum "
Du côté des grands médias, notamment télévisuels, le traitement du sujet " élections européennes " a été digne d'une grève des urgences civiques. Hors campagne officielle, celle qui décline les idées au format "spot de pub", on a eu droit au service minimum des deuxièmes parties de soirée. Les politiques, invités à présenter leurs orientations et programmes y ont exercé l'art du détournement du sujet. Au choix, les polémiques franco-françaises et l'épouvantail de la Turquie agité comme si c'était LE sujet chaud d'actualité ! Un battage à faire oublier, qu'au plus tôt ce pays rejoindra l'Union dans une bonne quinzaine d'années. Jeudi 10 juin, la question a monopolisé pendant près d'une demi-heure " Mots croisés ", l'unique rendez-vous politique en prime-time de cette semaine préélectorale !

L'Europe sociale
" Maintenant l'Europe sociale ", l'accroche électorale du Parti Socialiste est sans risque. C'est selon tous les observateurs le thème qui intéresse le plus les Français. Retraite, sécurité sociale, durée du travail, chômage, répartition des richesses et de la rigueur, place des services publics... Il renvoie directement aux problèmes auxquels peuvent être confrontés tous les citoyens. Ce que l'on peut regretter c'est que ce soit avant tout une profession de foi mais pas encore un programme. Et puis " L'Europe sociale ", c'est l'ingrédient tendance. À droite, à gauche, au centre, chacun l'accommode à sa façon. Et à force de le mettre à toutes les sauces, c'est comme l'Europe tout court, on ne plus trop ce que ça veut dire. Retour à la case départ, pourtant, de l'Europe sociale, économique, politique, environnementale, durable, équitable... il y a tant de choses que j'aurai voulu savoir.

L'Europe vers la constitution
Référendum ou pas ? Bien entendu, consulter directement les citoyens semble la solution la plus démocratique. Maintenant, s'il faut faire une campagne éclair à grands coups de petites phrases et de spots de pub, je ne sais pas si c'est souhaitable. Pour répondre oui ou non, encore faudrait-il que nous comprenions bien les points-clés de la constitution. Une constitution, c'est sérieux, c'est ce qui fonde une société. Et une société composée de 25 nationalités, c'est déjà une grosse "multinationale " ! De deux choses l'une. Soit nous laissons à nos représentants, ceux que nous avons élus et donc mandatés le soin de trancher. C'est de la démocratie indirecte. Soit on privilégie la voie suffrage direct. Chaque citoyen sera donc individuellement responsable de son choix, tout au moins en apparence. Si celui-ci n'a pas le temps, ni les moyens de s'informer vraiment, quelle sera sa vraie marge de man½uvre pour se déterminer ?