Chère Ségolène Royal, cher Olivier Falorni, j'avais imaginé un huis clos, vous deux et moi. J'avais des questions. Je voulais des réponses, les yeux dans les yeux, loin des micros et des caméras. Vous n'auriez pas vu passer mon invitation. Pris dans les feux des médias avec lesquels vous jouez si bien, Ségolène de longue date, Olivier en démontrant qu'il apprend, très vite. Pourtant, quel que soit le résultat, dimanche 17 juin 2012, votre duel est perdant-perdant. Restait la lettre ouverte. Celle d'une des voix du "peuple de gauche" de La Rochelle et l'île de Ré qui n'est pas dans la posture du "tout sauf". Qui se refuse d'être d'un camp ou de l'autre. Une voix qui aurait préféré une élection, dès son origine, "à la loyale". Une voix qui veut simplement élire son député de la majorité présidentielle. Une voix qui est aujourd'hui l'otage d'une guerre dont les subtilités d'appareil(s) lui échappent, tant elles sont nombreuses et croisées. Une voix de ce peuple de gauche qui est le premier meurtri, bien avant les larmes émouvantes de Ségolène Royal. Une voix de gauche qui ne veut pas stigmatiser celles de droite. C'est la voix libre que je vous adresse, Madame Royal, Monsieur Falorni, cette lettre pour vous dire mon infinie tristesse. En colère et le coeur au bord des lèvres, à deux jours du scrutin, j'ai envie de déserter. Cette guerre, je ne veux pas la faire. Éclairages : la faute au P.S ? Parcours fléchés. Falorni en apparatichk du P.S vs les Désirs d'Avenir de Royal.
© Législatives 2012, 2e tour : Ségolène Royal - Olivier Falorni, dimanche 17 juin 2012
Lettre ouverte à Ségolène Royal et Olivier Falorni
Ma voix est celle de ce peuple de gauche "silencieux", qui ne milite, ni pour un camp, ni pour l'autre. Ni "Ségoléniste", ni "Falorniste". Une voix qui veut dépasser les vernis, les a priori qu'elle pourrait avoir sur l'une et l'autre des personnalités d'un duel fratricide. Une voix qui veut rester celle du citoyen électeur. Une voix qui refuse de "prendre les armes", même si l'idée de révolution, de résistance, est toujours très tentante. Une voix qui ne veut pas voter "contre", une voix anti-anti.
Oui, j'ai le coeur au bord des lèvres. J'ai envie de vomir tout ce que j'ai pu voir ou entendre. En boucle, de l'hyper-exposition médiatique au trop plein de phrases assassines. Jusqu'aux dernières salves : l'insupportable "tweet", si personnel, de Madame Trierweiler ou le détestable "Cheval de Troie" du dernier communiqué de presse des adjoints au maire de La Rochelle.
Sans face à face : un dos à dos perdant-perdant
Attention, au jeu du perdant-perdant, ce sont peut-être les voix de "la gauche silencieuse" qui, hélas, viendront grossir, dimanche 17 juin 2012, le camp des abstentionnistes. D'autres voix changeront peut-être d'intention de vote. Personne ne peut anticiper le passage à l'acte, dans l'isoloir, dans un tel contexte.
Certains électeurs qui ont donné leur voix à Olivier Falorni au premier tour estimeront que, finalement, Ségolène Royal, même si elle est à l'initiative du duel, ne mérite peut-être pas une telle humiliation. Sa stature d'ex-présidentiable peut jouer en sa faveur. Une forme d'empathie également avec une femme, face au drame humain que représenterait cet échec politique, même si on peut penser que ce serait une juste sanction pour cette erreur tactique d'appareil. D'autres seront peut-être lassés d'entendre, comme sur un disque rayé, Olivier Falorni abuser de trois arguments chocs et finalement simplistes, entre "d'ici", "parachutée" et "bulletin unique soviétique", même si on a le droit d'estimer que sa "rébellion" est aussi légitime qu'utile.
À l'inverse, des électeurs du premier tour de Ségolène Royal n'accepteront peut être pas de voir Olivier Falorni traîné à ce point dans la boue. C'est une forte tête, il ne lâche rien, mais comparer son maintien à la trahison de monsieur Éric Besson et l'ériger en "suppôt de la droite" pourrait les agacer au point de rejoindre les voix de la "résistance" Falorniste. Par ailleurs, des personnalités de gauche, qui n'ont rien à prouver, défendent aussi sa candidature.
Rien n'est si simplement sombre ou lumineux.
Ma voix pense aussi aux électeurs de droite !
Au nom de quelle République sont-ils, ici, ainsi stigmatisés ? Pas ceux des appareils et des cercles politiciens. Non, toutes celles et ceux qui partagent avec leurs concitoyens de gauche, dans cette élection législative par laquelle la Nation élit ses représentants, le droit de voter pour l'homme ou la femme, le ou la plus proche de leurs convictions. Ou le moins éloigné, puisque ces voix de droite n'auront le choix dans la circonscription de La Rochelle et de l'île de Ré qu'entre un bulletin de gauche et un bulletin de gauche. Car au-delà des éclats médiatiques, personne n'imagine qu'Olivier Falorni, s'il est élu, même exclu du groupe socialiste, votera contre le gouvernement de François Hollande ! Chacun sait qu'en France où les équilibres sont toujours ténus, les électeurs de gauche et de droite mélangent leurs voix, pour chaque grand scrutin. Chacun sait aussi, ici, que Michel Crépeau a été, le plus souvent, élu à La Rochelle au-delà du réservoir des voix de gauche.
Ma voix veut un(e) député(e) pas un élu local !
Ma voix rappelle aussi que les électeurs ne sont pas dupes, ni du jeu politique, ni de l'ambition légitime des hommes et des femmes qui s'y engagent. Ni Olivier Falorni, ni Ségolène Royal ne sont "désintéressés". Notre démocratie a besoin d'élu(e)s qui assument leurs ambitions.
Et c'est justement, alors que se posent de si nombreuses questions sur le rôle du Parlement et sur sa représentation, que le "duel de La Rochelle" vient occulter le coeur du sujet !
Balayée sur l'autel du "local", l'essence du mandat de député dont la principale mission est quand même le travail législatif ! Alors, qu'importe à ma voix si Monsieur Falorni est "né ici" ou si Madame Royal présente le "bon bilan de sa Région" ! Ce n'est pas la présidente du Poitou-Charentes, ni le "gars du cru" que ma voix souhaite élire au second tour d'une élection législative !
Bien entendu, pragmatique, ma voix peut se dire que Ségolène Royal sera plus utile pour faire avancer à Paris, les dossiers de mon territoire, qu'un Olivier Falorni qui est aujourd'hui banni officiellement par ses pairs. Ma voix se dit aussi que Madame Royal, toujours présidente de Région, saura, elle, se faire entendre. Ma voix imagine mal le gouvernement mettre au banc tout un territoire pour punir les Rochelais de leur "trahison" supposée ! Reste que la "chasse aux sorcières", qui semble déjà ouverte, va faire des ravages dans les rangs des "Falornistes" et répandre son onde de choc au-delà. Ne pas vouloir prendre parti est-ce déjà trahir ? Ma voix restera vigilante.
On ne refait jamais le match
Olivier Falorni est aujourd'hui allé si loin qu'il ne peut plus reculer. Les grands stratèges préfèrent toujours un bon accord à une mauvaise guerre. Jusqu'au bout, il faut préférer la diplomatie. Pour lui, la main tendue de Ségolène Royal, dimanche 10 juin 2012, est, bien entendu, arrivée trop tard. Mais rien n'empêche de rêver à un élan, héroïque, vraiment "au-dessus de la mêlée".
À dimanche ?
Chère Ségolène, cher Olivier, ne vous méprenez pas. Si le ton de ma lettre est mesuré, courtois, presque gentillet, c'est juste une réaction, épidermique, à la violence stérile que vous avez provoquée.
Je suis en colère. Je n'ai jamais pratiqué l'abstention ou le bulletin blanc. Au second tour de la présidentielle de 2002, j'ai voté facilement, sans aucun état d'âme.
Dimanche 17 juin 2012, je veux élire mon député de gauche. Et là, c'est comme si je devais choisir entre la peste et le choléra ! Je fais quoi ? Je prend une pièce pour vous jouer à : "face, elle perd" ; "pile, il perd". Je laisse "les autres" trancher à ma place ? Qui arrivera à me convaincre, sans faire grincer les violons de la victimisation, qu'il-elle a réussi à dépasser ses haines et son ego ? Vous vous drapez mutuellement dans les étendards de la sincérité, de la dignité, du respect des règles, du courage. Mais ma voix, elle choisit qui pour me représenter dignement ?
Derrière les grillages de vos cages médiatique, j'observe vos agitations et vociférations d'animaux politiques, nourris au même lait. Et je me dis qu'il est grand temps de se regarder en face les yeux dans les yeux. J'ai des questions à vous poser. J'attends des réponses. Sur la représentation du peuple. Sur vos positions sur la réforme territoriale ou le 3e acte de la décentralisation. Sur la réduction du "millefeuille" des collectivités qui a plombé la démocratie locale en laissant s'empiler, comme un jeu de poupées russes de petites baronnies dans les baronnies locales. Car mon député de gauche, lui, elle, devra travailler sur ces questions, dans l'intérêt de la Nation, sans tenir de comptes de campagne, pour préserver les soutiens locaux qui seront utiles, lors d'autres scrutins, à sa carrière politique.
Madame Royal, Monsieur Falorni, j'appelle vos intelligences à reconnaître vos erreurs mutuelles, à présenter vos excuses aux citoyens pour avoir confondu l'élection législative avec un ring sur lequel vous réglez, ainsi que vos alliés respectifs, les comptes de la gauche locale et à cesser le feu, séance tenante !
Très sincères salutations,
Nathalie Métayer
La Rochelle, 15 juin 2012
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Législative 2012 : l'investiture de Ségolène Royal à La Rochelle
On peut aussi se demander quelle est la responsabilité du bureau national du PS. Et où se situe vraiment le curseur de l'instrumentalisation.
Même si Maxime Bono avait une préférence personnelle pour Ségolène Royal. Même si, présidente de Région, présidentiable en 2007, elle pouvait très légitimement briguer ce mandat national, nécessaire à la suite de son parcours politique. Un dialogue avec Olivier Falorni, ici à La Rochelle, mais aussi entre les instances du P.S et celui qui était encore le secrétaire fédéral du parti en Charente-Maritime aurait permis de voir que la guerre pouvait se déclarer. A-t-il eu lieu ?
Il aurait été temps, alors, avant les annonces en place publique, de négocier ou bien, pour le Parti Socialiste, de conseiller à Ségolène Royal de choisir une autre circonscription. Soit, même si c'était moins élégant, de revenir à Melle, celle qu'elle avait confiée à Delphine Batho en 2007. Soit d'aller au front, conquérir une circonscription de droite, gagnable, mais en se battant, ce qui aurait ajouté du panache à sa démarche et des arguments pour présenter sa candidature à la présidence de l'Assemblée nationale. De plus, une candidature hors Poitou-Charentes, plus neutre, lui aurait évité de devoir composer avec ses inimitiés et affinités locales. Et par ailleurs de s'aventurer sur un terrain de conflits d'intérêts dans un territoire où elle a le pouvoir que lui confère la présidence de la Région.
Partis politiques : le parachutage n'a plus la côte
Au fil des discussions, dimanche soir à La Rochelle, au-delà du cas Royal - Falorni, certains constataient que les "parachutages", pas forcément au sens de la légitimité d'un territoire mais du diktat des instances des partis, à droite, comme à gauche "passent" de plus en plus mal. Autrefois, c'était chose courante et cela permettait de faire sortir un homme ou une femme du lot ou bien d'offrir une compensation, voire une récompense pour sacrifice accepté ailleurs ou service rendu.
Olivier Falorni, un homme d'appareil
Par le passé dociles, aujourd'hui, les élus de terrain se rebiffent plus souvent. C'est le cas, à La Rochelle, d'Olivier Falorni. Passé par le M.J.S, il a déjà plusieurs mandats et peut effectivement être qualifié "d'apparatchik" du P.S au sens d'un "membre de l'appareil". En fait, son parcours a été parfaitement fléché par son parti qui a vu en lui, à un moment, un potentiel capable de prendre des responsabilités et lui en a données. Si on l'accuse aujourd'hui d'avoir "vérouillé" la fédération, et même pire, personne ne peut lui reprocher d'avoir construit ses réseaux. Cela fait parti de son job de politicien de terrain. Et son "fléchage" à un moment ou un autre, devait se concrétiser par une investiture "méritée". Il avait espéré que le siège de député laissé vacant par Maxime Bono serait celle-là. Ensuite au P.S, chacun s'inscrit aussi dans un courant. Pour sa part, il a fait, plus tôt que d'autres, le choix du camp "Hollande".
Ségolène Royal : hors-norme
Si elle a débuté en parfaite apparatchik du Parti Socialiste, Ségolène Royal a ensuite choisi une autre stratégie. Femme libre, "femme debout", plutôt que les luttes internes de courant, elle s'est installée à la marge, la lisière entre le P.S et "ailleurs". Cette stratégie est à la fois sa force et sa faiblesse. Elle lui a permis à la fois d'accéder à l'investiture du P.S pour la présidentielle de 2007 et provoqué l'ire de certains de ses pairs qui n'ont rien fait pour qu'elle accède à la présidence. Son "bras armé" a été la création de "Désirs d'avenir", une association dont on aurait pu imaginer qu'un jour, elle se transforme en parti. Et localement, Désirs d'Avenir a joué le rôle de "contre-pouvoir" face à la fédération officielle du P.S.
À lire aussi
Publié sur ubacto.com le 30 mai 2012 : Ségolène Royal brigue la succession de Maxime Bono et la présidence de l'Assemblée Nationale.
Publié sur ubacto.com le 20 avril 2012 : les réponses d'Olivier Falorni à notre questionnaire, avant la veille du premier tour de l'élection présidentielle 2012.
Réagir: contacter Nathalie Métayer - ubacto.com - Publié le : 16-Jun-2012